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Dans la collection Des planches et des mots éditée par les publications scientifiques du Muséum est paru en 2017 un ouvrage consacré à la collection de dessins inédits de poissons conservée à la Bibliothèque centrale du Muséum : Charles Plumier (1646-1704) et ses dessins de poissons de France et des Antilles.
Artisan, dessinateur et graveur, mais mieux connu pour son œuvre de botaniste, Charles Plumier a consacré la plus grande partie de sa vie à recueillir et dessiner des plantes et des animaux. Précédant de près d’un siècle les grands naturalistes du dix-huitième siècle dont les descriptions de nouveaux spécimens ont inondé l’Europe à cette époque, le principal mérite de l’apport de Charles Plumier à la botanique et à la zoologie a été attribué à d’autres. Né à Marseille en 1646, Charles Plumier est d’abord formé par les religieux du Couvent des Minimes aux mathématiques et aux sciences physiques, mais il se tourne rapidement vers l’histoire naturelle, se lançant dans l’étude de la botanique avec un grand enthousiasme. Il impressionne tellement ses supérieurs, tant par ses talents de botaniste que de dessinateur et de graveur qu’il est engagé, en 1689, comme naturaliste à bord d’une expédition vers les possessions françaises des Antilles pour collecter des spécimens d’histoire naturelle. L’immense succès de son voyage, suivi par deux expéditions aux Antilles, lui assure un revenu à vie et lui vaut le titre de Botaniste du roi. Souvent malade et toujours préoccupé par l’édition de son œuvre, le père Plumier passera les dernières années de sa vie dans sa cellule du Couvent des Minimes de la Place royale de Paris à compiler ses notes et ses dessins et à préparer ses manuscrits pour l’édition. Alors qu’il avait entrepris un voyage vers le Pérou pour identifier l’arbre qui produit de la quinine, il est victime d’une attaque de pleurésie et meurt le 20 novembre 1704 à l’âge de 58 ans. Si ses travaux sur les fougères d’Amérique, que le père Plumier a publié de son vivant, sont connus, et si quelques dessins de plantes ont fait l’objet d’études approfondies, sa contribution aux progrès des sciences naturelles reste mal connue.
L'héritage de Charles Plumier est parvenu jusqu'à nous grâce à un ensemble remarquable de dessins et de manuscrits conservés dans les collections de la Bibliothèque centrale du Muséum national d'histoire naturelle à Paris. Sur près de 6000 dessins, environ 4300 sont consacrées aux plantes, 1550 aux animaux, montrant que la curiosité scientifique du botaniste du Roi excède largement sa mission première.
De son vivant, les dessins de Charles Plumier étaient célèbres par la précision scientifique et la beauté des dessins qui rendent compte des observations du naturaliste sur le terrain, affinées par l’analyse au microscope à l’aide de lentilles qu’il avait perfectionné lui-même. D’emblée considérés comme particulièrement importants, les dessins de Plumier ont été partiellement cités, copiés, étudiés par de grands botanistes tels Sébastien Vaillant, Joseph Pitton de Tournefort, Bernard puis Antoine-Laurent de Jussieu, Carl von Linné.
En 1698, Plumier avait indiqué que ses dessins pourraient remplir dix livres sur les plantes, équivalent à celui qu’il avait déjà publié, et deux autres sur les animaux. Cependant, les trois publications que Plumier a pu mener à bien de son vivant ne présentent qu’une petite partie de ses dessins de botanique. À sa mort, en 1704, si Plumier avait achevé la préparation de l’édition de certains de ses volumes, les manuscrits de zoologie sont restés inédits, de même qu’une partie de ses travaux de botanique.
Les dessins zoologiques montrent des spécimens entiers et diverses vues anatomiques détaillées. Parmi les dessins zoologiques conservés à la Bibliothèque centrale du Muséum à Paris, les mollusques (bivalves, gastéropodes, chitons et nudibranches) sont les plus représentés (avec 567 dessins), suivis par les poissons d’eau de mer et d’eau douce (faisant l’objet de 345 planches séparées de spécimens entiers), sans compter les nombreux dessins illustrant des détails anatomiques. Les oiseaux sont représentés par 215 dessins ; les amphibiens (grenouilles) et reptiles (serpents, lézards, tortues et un crocodile) forment 360 planches (la plupart étant des croquis anatomiques détaillés). Les mammifères (comprenant des chauves-souris, un opossum, un éléphant, un dauphin et un marsouin) sont illustrés par 10 dessins. 46 autres planches sont consacrées à divers mollusques invertébrés.
Théodore W. Pietsch est professeur émérite à la School of Aquatic and Fisheries Sciences, et conservateur émérite au Burke Museum of Natural History and Culture, deux institutions de l’Université de Washington.
Ses recherches concernent principalement l’ichtyologie marine, plus particulièrement la phylogénie, l’histoire de l’évolution, la morphologie fonctionnelle et la biologie reproductive des poissons téléostéens. Il est également l’auteur d’un grand nombre de publications dans le domaine de l’histoire des sciences, parmi lesquelles des ouvrages sur l’anatomiste Georges Cuvier, sur le libraire, éditeur et agent secret Louis Renard, et sur le naturaliste suédois Peter Artedi.
Ses dessins zoologiques étant restés longtemps inédits, l’influence de Charles Plumier sur la zoologie a été relativement peu explorée. Cet ouvrage, le premier d’une série de monographies à paraître sur l’œuvre de ce grand savant naturaliste, invite à découvrir son importance pour l’histoire des sciences comme pour l’histoire du dessin naturaliste. Il donne une nouvelle vie à des images quasiment invisibles pendant près de trois siècles.
Consulter les recueils de dessins zoologiques du Père Charles Plumier numérisés dans notre bibliothèque numérique :